trois épitaphes

Aulu-Gelle, NA, I, 24
      Ce bref passage offre des intérêts divers, et peut donc être proposé à des petites classes, qui pourront même, avec l'aide du professeur qui expliquera les archaïsmes, s'exercer à le traduire.
  1. Etude préliminaire : Le rôle du tombeau et de l'épitaphe dans l'antiquité : Les romains faisaient grand cas de leur future sépulture, et la préparaient de longues années à l'avance. Aujourd'hui encore, on peut admirer de nombreux tombeaux sur la via Appia, à la sortie de Rome. On se promenait parmi les inscriptions funéraires en les déchiffrant et les commentant. On peut rechercher dans Martial les allusions à cette activité. Au Moyen-Age encore, les cimetières sont des lieux de promenade privilégiés.
  2. les personnalités différentes Aulu-Gelle veut bien sûr opposer la fierté des deux premiers et la discrétion du troisième.
  3. La langue : archaïque chez Naevius et Plaute, ce qui ne déplaît sans doute pas à Aulu-Gelle, amateur d'antiquités. loquier = loqui ; apiscor verbe rare qui donne aptus sum, à ne pas confondre avec l'adjectif aptus, a, um. Chez Pacuvius, on peut remarquer, en revanche, la forme plus familière aspicias, mise pour adspicias, et le subjonctif construit librement après uolebam.
  4. La poésie prend des visages tout aussi divers : étudier les sonorités chez Naevius : immortales/mortales et surtout : foret fas flere flerent. Plaute Risus Ludus Iocus et Numeri innumeri. Comme le dit Aulu-Gelle, celle de Pacuvius est beaucoup plus discrète. La seule coquetterie est le rejet ossa. Pourquoi ?
  5. Etude particulière de la troisième épitaphe : Le jeune homme, qui par son âge et sa beauté s'oppose à la vieillesse et à la mort ; la modestie : seul le mot poeta montre la position particulière de l'auteur ; la rapidité : le jeune homme s'arrête le temps de lire quatre vers le uale final, qui indique au lecteur qu'une simple pensée pour le poète suffit.
  6. Chacune de ces études a démontré que Aulu-Gelle cherche à mettre Pacuvius en valeur, sans pour autant rabaisser les deux précédents.

Traduction, à but utilitaire seulement

     A cause de leur notoriété et de leur beauté, j'ai trouvé intéressant de transcrire dans ce recueil de notes les épigrammes de trois poètes, Cnaeus Naevius, Plaute et Marcus Pacuvius, qu'ils composèrent eux-mêmes, et qu'ils laissèrent pour être gravées sur leurs tombeaux.
     L'épigramme de Naevius est pleine d'une fierté campanienne, et aurait pu être un témoignage exact, si elle n'avait été faite par lui-même.
Si les immortels avaient le droit de pleurer les mortels,
Les divines Camènes pleureraient le poète Naevius.
Aussi lorsqu'il fut livré en dépôt à Orcus,
On oublia à Rome de parler le latin.
      L'épigramme de Plaute, que j'aurais hésité à lui attribuer si elle n'avait été citée par Marcus Varron dans son premier livre sur les poètes :
Maintenant que Plaute a atteint la mort, la Comédie est en deuil,
la scène désertée, et aussi le Rire, le Jeu et la Joie
et ses innombrabres mètres, ensemble, se sont mis à pleurer.
      Epigramme très discrète, très pure de Pacuvius, et très digne de sa très élégante grâce :
jeune homme, même si tu es pressé, cette pierre
demande que tu lui jettes un regard, puis que tu lises ce qui est écrit.
Ici reposent les os du poète Marcus Pacuvius.
Je voulais que tu ne l'ignores pas. Adieu.