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Le premier lectisterne

Le lectisterne est un rite emprunté aux grecs, comme d'ailleurs l'habitude de manger allongé-accoudé. La cérémonie mime un repas offert aux dieux, dont les bustes sont placés sur des lits richement dressés.
On pourra étudier :
  1. Le terme : lecti-sterne, deux mots qui se lisent un peu plus bas : stratis lectis. Sternere est le verbe régulièrement employé pour « dresser un lit ». On peut prolonger la recherche par une étude du triclinium et de la disposition des lits pour la cena. Les anciens Romains mangeaient assis, et ne sont revenus à cette position que longtemps après la christianisation, puisque certaines fresques montrent les convives de la Cène allongés-accoudés.
  2. autre étude lexicale, celle des différents sens de sterno : étendre sur le sol, renverser, niveler, recouvrir, garnir (un lit, donc le dresser), paver, seller... C'est le sens de « paver » qui a donné strata, « chemin pavé », qu'on rerouve dans Strasse, ou street.
  3. conjugaison : Le texte est particulièrement riche en passifs et en tournures impersonnelles.
  4. Ce que la mise en scène elle-même a de frappant : Une statue apparaît facilement comme désincarnée, même si l'antiquité a pu souvent les habiller et peindre. Ce simulacre de repas leur donne une force de vie singulière, propre à impressionner les Romains. Ce pouvoir a été soigneusement préservé par la rareté des lectisternes, qui sont presque toujours précédés d'une consultation des livres Sibyllins.
  5. L'atmosphère particulière qui s'établit dans la Ville, et qui montre à quel point le sentiment collectif était puissant. Peut-on trouver une explication à ce mouvement de communion, y compris envers les étrangers ?
       A un hiver pénible, soit à cause des caprices du ciel car un changement soudain amena un temps opposé, soit pour une autre cause, succéda immédiatement un été pesant et malsain pour tous, gens et bêtes ; et comme à cet incurable fléau on ne trouvait ni cause ni remède, on alla ouvrir, à la suite d'un sénatus-consulte, les livres Sibyllins. Les duumvirs, voulant faire une cérémonie, accomplirent pour la première fois un lectisterne, et apaisèrent pendant huit jours Apollon, Latone et Diane, Hercule, Mercure et Neptune, en dressant trois lits avec le plus grand apparat dont on était alors capable. Cette cérémonie fut aussi célébrée en privé. Par toute la ville, les portes restaient ouvertes et devant, on plaçait tous ses biens pour un usage commun ; on raconte que les étrangers, connus et inconnus, recevaient l'hospitalité, et qu'on parlait avec bienveillance et entrain même à ses ennemis personnels ; on tempéra les querelles et les différends ; pendant ces jours, on ôta les chaînes des prisonniers, puis on n'osa pas les enchaîner [de nouveau], eux à qui les dieux avaient apporté leur aide.