Apprendre à lire et à écrire (2)

    Mais quand il aura commencé de suivre les tracés des lettres, il ne sera pas inutile qu'ils soient gravés le mieux possible sur une tablette, afin que son style soit conduit par eux comme par des sillons. Ainsi, il ne se trompera pas comme s'il traçait dans la cire (il sera contenu de chaque côté par les bordures, et ne pourra sortir hors de ce qui aura été tracé d'avance) et en suivant ces traces sûres, il aura plus vite et plus souvent les doigts sûrs, et n'aura pas besoin du secours de la main du maître posée sur sa main. Bien que ce soit d'ordinaire presque négligé par les gens de bonne famille, ce n'est pas à autrui de s'occuper d'écrire vite et bien : C'est essentiel pour les études, et ne s'y prépare vraiment que celui qui croît sur le sol de l'écriture personnelle et y plonge de profondes racines, alors qu'une écriture trop lente retarde la réflexion, et on a du mal à comprendre une écriture rudimentaire et désordonnée : il s'ensuit donc qu'il faut dicter à quelqu'un d'autre ce qu'on veut transcrire. C'est pourquoi toujours et partout, et surtout pour les lettres secrètes et intimes, on se réjouira ne pas avoir négligé cela.
    Des lettres en os dans le texte précédent, maintenant des tablettes gravées. On voit que Quintilien s'est même intéressé à l'équipement du jeune élève. L'archéologie en a-t-elle retrouvé des traces ?
    La civilisation romaine est donc restée une civilisation de la parole. L'écriture est encore malaisée et peu répandue. Tous les pères du sénat sont des orateurs, mais beaucoup dictent leurs discours faute de pouvoir écrire avec suffisamment de fluidité ! En revanche, ils soignent jalousement leur diction. La métrique est primordiale, même en prose.
    L'argument de Quintilien vaut la peine d'être apprécié tant il diffère de ce qu'on dit aujourd'hui : nous devons apprendre à écrire pour que nos messages restent confidentiels. Un secrétaire risque un jour ou l'autre de nous trahir.